Tel maître, tel chien ? C’est une assomption que nous avons depuis longtemps. Déjà en 1961 Walt Disney représentait des maîtres et des chiens très assortis dans son film les 101 dalmatiens. Et plusieurs études récentes au niveau de la communication homme-chien suggèrent que c’est le cas, tant au niveau du physique que de la personnalité !
Comment explique-t-on ce phénomène ? Une croyance populaire veut que nos chiens soient le miroir de nos émotions. On utilise particulièrement cette image dans le cas des chiens anxieux. Ils seraient comme des éponges trop gorgées de l’anxiété que nous déversons sur eux. Mais est-ce vraiment le cas ? Eh bien… oui et non ! Comme toujours, la réalité est complexe et toute en nuances. C’est ce que je vais vous expliquer aujourd’hui !
Dans cet article, vous apprendrez davantage sur :
Votre chien vous ressemble-t-il ?
Votre chien ressent-il vraiment votre stress ?
La contagion émotionnelle, un phénomène surprenant !
Adopter un deuxième chien pour calmer le premier ?
En prime : vous retrouverez les études scientifiques qui m’ont permis de rédiger cet article
Les émotions humaines : quel impact sur le comportement de votre chien ?
Avez-vous déjà eu l’impression que votre chien pouvait lire dans vos pensées ? Peut-être l’avez-vous vu accourir pour vous réconforter alors que vous étiez triste ? Ce n’est pas un hasard ! Les chiens sont de véritables détecteurs d’émotions. Ils captent nos moindres changements d’humeur et réagissent en conséquence.
La contagion émotionnelle : quand nos émotions déteignent sur le comportement de nos chiens
La connexion émotionnelle entre le chien et l’humain :
La contagion émotionnelle existe également entre l’Homme et son meilleur ami. Par exemple, lorsque les propriétaires expriment de la joie, leurs chiens peuvent réagir en montrant des signes d’excitation, comme remuer la queue ou sauter autour d’eux. De plus, les chiens sont particulièrement sensibles à nos émotions lorsqu’elles sont négatives, comme la peur ou la tristesse. Ils manifestent alors plus de comportements de stress comme figer ou une augmentation de leur fréquence cardiaque.
Là encore, la qualité de la relation semble jouer un rôle crucial. Une étude a révélé que les chiens vivant depuis longtemps avec leurs propriétaires, sont plus susceptibles de ressentir et de refléter leurs émotions.
Et cette connexion existe aussi entre congénères :
Les chiens, en tant qu’animaux sociaux, sont particulièrement sensibles aux émotions de leurs congénères.
Ainsi, une étude a démontré que les chiens exposés à des congénères joyeux adoptent eux-mêmes des comportements de jeu et d’excitation, tels que courir et sauter. Ils peuvent donc refléter l’enthousiasme de leur entourage canin. À l’inverse, lorsqu’ils sont entourés de chiens stressés, ils peuvent manifester des signes similaires de stress, ce qui souligne l’importance d’un environnement social positif pour leur bien-être.
Par exemple, dans un parc à chiens, si un chien commence à aboyer de manière anxieuse, il n’est pas rare que les autres chiens commencent aussi à aboyer, même s’ils n’ont pas identifié de danger ou de stress eux-mêmes. On appelle ce phénomène la facilitation sociale.
Un peu comme pour une maladie, la contagion émotionnelle est influencée par la proximité entre deux chiens. Plus le lien entre eux est fort, plus ils sont sensibles aux émotions de l’un et de l’autre.
Par exemple, dans un foyer avec plusieurs chiens qui partagent des interactions positives régulières, un chien stressé ou excité peut plus facilement influencer les émotions de ses compagnons. C’est pourquoi il est souvent déconseillé d’adopter un deuxième chien pour corriger les problèmes de comportement du premier. Un chien atteint d’anxiété de séparation, au lieu d’être rassuré par un congénère, pourrait plutôt lui « transmettre » son problème. On viendrait alors complexifier la situation au lieu de la résoudre.
Bref, n’achetez pas un deuxième problème !
Comment les chiens perçoivent et réagissent aux émotions humaines
Imaginez que vous jouez à un jeu de mime avec vos amis : vous devez deviner ce qu’ils essaient de vous dire uniquement à travers leurs gestes et expressions, sans la moindre parole pour vous guider. Vous pourriez vous sentir frustré ou confus, car il est souvent difficile pour nous, humains, de capter les subtilités des signaux non verbaux.
Votre chien, en revanche, est expert en la matière. En effet, il communique naturellement via ses postures et ses mouvements. Et comme il ne comprend pas notre langage d’humains, il a vraiment tout misé sur le décodage de votre langage non-verbal !
Les chiens perçoivent les expressions faciales humaines :
Dans ce jeu de mime, votre chien est donc devenu un champion du décodage. Il peut distinguer un sourire d’un visage neutre, même à partir de photos, ce qui montre sa capacité à comprendre nos émotions. De plus, il peut différencier les expressions émotionnelles heureuses des expressions colériques en se basant sur ses souvenirs de vos expressions passées.
Contrairement à nous, qui nous concentrons souvent sur le visage, les chiens prêtent plus d’attention à l’ensemble du corps pour capter des indices émotionnels . Rien de plus normal, car lui même communique ses émotions avec son corps, notamment via le port de ses oreilles et de sa queue.
Le pouvoir de votre voix pour communiquer avec votre chien :
Même si votre chien ne comprend pas tout ce que vous dites, il est tout de même capable de percevoir vos émotions lorsque vous lui parlez.
Les chiens réagissent différemment aux sons que vous émettez selon l’émotion qu’ils portent. Par exemple, ils montrent des comportements distincts lorsqu’ils entendent des sons joyeux ou contrariés, et peuvent même ressentir vos émotions négatives. Leur cerveau traite ces sons de manière spécifique, utilisant l’hémisphère droit pour les sons négatifs et l’hémisphère gauche pour les positifs. En revanche, lorsque nous essayons de nous faire comprendre uniquement par notre ton de voix et nos gestes, nous pouvons parfois manquer de précision, ce qui rend la communication plus difficile.
Les chiens peuvent parfois refléter les émotions qu’ils captent. Ils partagent leur humeur avec vous par le biais du mimétisme, un comportement lié à la contagion émotionnelle, par exemple lorsque vous prenez une voix aigue et que vous parlez joyeusement à votre chien, il risque très probablement d’adopter à son tour une attitude joyeuse en remuant la queue.
Ils peuvent également déduire des informations de vos expressions et les utiliser pour prendre des décisions. Par exemple, si votre chien prend un air penaud lorsque vous rentrez du travail et découvrez qu’il a mangé vos souliers préférés, c’est n’est pas parce qu’il se sent coupable mais plutôt parce que votre contrariété le met mal à l’aise.
Votre chien ressent-il réellement les émotions humaines ?
La question de savoir si le stress humain peut se transmettre aux chiens anime aussi la communauté scientifique!
Ce que nous savons, c’est que nos chiens sont de fins observateurs, remarquablement sensibles à nos émotions. Par exemple, des études montrent que les chiens peuvent détecter les odeurs associées au stress psychologique avec une précision de 93,75 % !!! Cela signifie qu’ils perçoivent les changements chimiques liés au stress dans notre corps, comme l’augmentation du cortisol ou de l’adrénaline.
Plus fascinant encore, les niveaux de stress à long terme des chiens tendent à être corrélés à ceux de leurs propriétaires. On pourrait presque dire qu’ils nous servent de miroir émotionnel ! Aussi, la personnalité de l’humain semble jouer un rôle clé : les chiens de propriétaires moins stables émotionnellement sont plus susceptibles de montrer des signes d’agression ou de peur. De quoi se motiver à commencer à faire de la méditation !
Pourtant, comme toujours, tout n’est pas aussi simple ! Une autre étude a montré que les niveaux de cortisol et la fréquence cardiaque d’un chien ne varient pas de manière significative en réponse au stress de son propriétaire lors d’une promenade . Elle suggère donc que finalement, le stress ne serait pas si contagieux.
Savez-vous réellement reconnaitre les signes de stress chez votre chien ? Découvrez les indices à ne pas manquer dans la vidéo de Maély :
Le verdict final : Est-ce que l’humain transmet son stress à son chien ?
Alors, comment expliquer ces contradictions ? Eh bien il faut savoir faire la différence entre corrélation et causalité : même si nos émotions et celles de nos chiens semblent liées, cela ne signifie pas nécessairement que l’une cause l’autre. En fait, une autre hypothèse pourrait éclairer ce phénomène. Les chiens réagiraient bien à nos émotions : non par contagion directe, mais par conditionnement et apprentissage.
Comment le conditionnement et l’apprentissage affecte la perception de nos chiens :
Voici comment cela fonctionne : les chiens sont de véritables détecteurs d’émotion, mais surtout, ils sont des apprenants astucieux. Ils associent nos émotions à des conséquences positives ou négatives au fil du temps.
Prenons un exemple concret : si un chien observe régulièrement de la colère chez son propriétaire, il peut vite associer cette émotion à une éventuelle punition. Résultat ?
Il réagit plus fortement à la colère qu’à d’autres émotions, et va exprimer lui aussi une émotion négative. Cette hypothèse est supportée par une étude qui a démontré que, contrairement aux chiens « de compagnie », les chiens de laboratoires ne sont pas vraiment affectés par la colère des humains mais plutôt par leur tristesse. On peut supposer que dans leur cas, ils sont rarement exposés à la colère de leurs soigneurs mais qu’une expression de tristesse sur leur visage annonce une manipulation douloureuse. L’expérience vécue est donc un facteur essentiel dans la façon dont les chiens interprètent et réagissent aux émotions humaines.
Cette hypothèse permettrait d’expliquer pourquoi plusieurs études ont trouvé que les humains présentant un trait de personnalité appelé névrotisme ont plus de chance d’avoir un chien anxieux. Le névrotisme, c’est un terme parapluie qui caractérise les personnes souffrant de sautes d’humeur, d’irritabilité et/ou de dépression. Ces personnes ont tendance à créer un environnement émotionnel instable autour d’eux.
Les chiens, attentifs à ces fluctuations, peuvent s’adapter à ces variations émotionnelles constantes, mais cela peut leur causer du stress. Des chercheurs ont également trouvé que les personnes dépressives ont une plus grande tendance à recourir à des méthodes de dressage de chienbasées sur la confrontation. Ces méthodes, basées sur la punition, créent un climat de tension où le chien apprend à anticiper des conséquences désagréables. Avec le temps, ce type d’environnement peut conditionner le chien à vivre dans un état de vigilance quasi permanent, renforçant ainsi ses propres comportements anxieux.
En résumé, nos chiens ne se contentent pas de copier nos émotions.
Ils les analysent, les interprètent et les apprennent, en fonction de l’environnement dans lequel ils évoluent et des expériences qu’ils accumulent à nos côtés.
L’interaction entre nos émotions et celles de nos chiens est donc bien plus complexe qu’une simple transmission : elle est le résultat d’un subtil mélange de biologie, de comportement appris et d’expérience partagée.
Peut-on transmettre son stress à son chien ? Maély répond à cette question en vidéo :
Le rôle de l’éducateur canin dans la communication humain-chien :
Attention, le rôle de l’intervenant canin n’est pas de juger ou de culpabiliser l’humain en lui mentionnant que son état émotionnel affecte celui de son chien !
Là où l’intervenant en comportement canin excelle, c’est en fournissant des solutions concrètes et adaptées pour aider à gérer le stress, l’anxiété ou la réactivité du chien. En offrant des outils pratiques et efficaces, il permet aux propriétaires de retrouver du contrôle sur la situation. Et ça, ça peut avoir un effet indirect mais puissant sur leur propre stress ! Moins de problèmes avec le chien, plus de sérénité pour le maître.
Si l’influence de nos émotions sur nos chiens passe par nos actions, cela implique forcément que l’intervenant joue un rôle clé en apprenant aux propriétaires comment interagir de manière appropriée avec leur chien. Mieux lire le langage canin, désensibiliser le chien à certains stresseurs, établir des routines rassurantes, offrir à son chien des activités masticatoires : tout cela non seulement aide le chien à mieux vivre, mais améliore aussi la relation entre le propriétaire et son compagnon – sans culpabilité, juste avec une mise en action ciblée.
La relation entre un humain et son chien est bien plus profonde qu’une simple connexion émotionnelle. Nos compagnons à quatre pattes sont de véritables experts en lecture d’émotions, capables de capter et de réagir à nos humeurs avec une sensibilité impressionnante.
Cependant, la contagion émotionnelle entre nous et nos chiens n’est pas aussi directe qu’on pourrait le penser. Ils apprennent, s’adaptent et réagissent en fonction de leur environnement, des expériences partagées et de l’attitude des humains qui les entourent.
Comprendre cet équilibre subtil entre biologie, conditionnement et génétique nous permet d’améliorer notre relation avec eux.
Quant aux dresseur de chiens, ils jouent un rôle essentiel en fournissant à leurs humains les outils nécessaires pour accompagner leurs chiens vers un bien-être optimal, sans culpabilité mais avec des solutions concrètes. En fin de compte, en apprenant à décoder le langage émotionnel de notre chien, nous renforçons notre lien avec lui, et c’est là que réside la vraie magie de cette connexion unique !
Si vous souhaitez en savoir plus sur l’interaction entre les émotions canines et humaines, nous vous recommandons de poursuivre vos apprentissages avec notre cours en ligne Émotions partagées : le rôle de l’humain dans la gestion de la réactivité du chien.De plus, avec le code promotionnel CHIEN10, vous obtenez une réduction de 10% sur vos achats.
Müller et al. (2015) – Dogs can discriminate emotional expressions of human faces.
Correia-Caeiro et al. (2021) – Bodily emotional expressions are a primary source of information for dogs, but not for humans.
Albuquerque et al. (2021) – Dogs can infer implicit information from human emotional expressions.
Contagion émotionnelle et mimétisme chez le chien
Ces études examinent la façon dont les chiens « absorbent » ou réagissent aux émotions de leur entourage :
Palagi, Nicotra & Cordoni (2015) – Rapid mimicry and emotional contagion in domestic dogs.
D’Aniello et al. (2017) – Interspecies transmission of emotional information via chemosignals: from humans to dogs.
Palagi & Cordoni (2020) – Intraspecific Motor and Emotional Alignment in Dogs and Wolves: The Basic Building Blocks of Dog-Human Affective Connectedness.
Wilson et al. (2022) – Dogs can discriminate between human baseline and psychological stress condition odours.
Kis et al. (2012) – The effect of the owner’s personality on the behaviour of owner-dog dyads.
Dodman, Brown & Serpell (2018) – Associations between owner personality and psychological status and the prevalence of canine behavior problems.
Anderson, Ryan & Storey (2020) – Personality Traits and Owner-Dog Attachment in a Canadian Sample.
Gobbo & Zupan (2020) – Dogs’ sociability, owners’ neuroticism and attachment style to pets as predictors of dog aggression.
Réactivité et gestion du stress chez le chien
Ces études traitent de la réactivité émotionnelle et du stress chez les chiens, et de leur modulation en fonction de leur environnement social et physique :
[6] Gfrerer, Taborsky & Würbel (2017) – Benefits of intraspecific social exposure in adult Swiss military dogs.
[13] Berns, Brooks & Spivak (2015) – Scent of the familiar: An fMRI study of canine brain responses to familiar and unfamiliar human and dog odors.
[22] Harvie et al. (2021) – Does stress run through the leash? An examination of stress transmission between owners and dogs during a walk.
[27] Barnard et al. (2018) – Personality traits affecting judgement bias task performance in dogs.
[45] Schöberl et al. (2016) – Social factors influencing cortisol modulation in dogs during a strange situation procedure.
Anxiété et facteurs de risque chez les chiens
Ces études portent sur les divers facteurs qui contribuent à l’anxiété chez les chiens, y compris les influences génétiques, sociales et environnementales :
Svartberg & Forkman (2002) – Personality traits in the domestic dog (Canis familiaris).
Barnett & Gotlib (1988) – Psychosocial functioning and depression: distinguishing among antecedents, concomitants, and consequences.
Rooney, Clark & Casey (2016) – Minimizing fear and anxiety in working dogs: A review.
Salonen et al. (2020) – Prevalence, comorbidity, and breed differences in canine anxiety in 13,700 Finnish pet dogs.
Facteurs environnementaux et expériences de vie
Ces études explorent l’impact de l’environnement et des premières expériences de vie sur le comportement et le bien-être des chiens :
Tiira & Lohi (2015) – Early life experiences and exercise associate with canine anxieties.
Stephen & Ledger (2006) – A longitudinal evaluation of urinary cortisol in kennelled dogs, Canis familiaris.
Chauvel-Cresp (2021) – Prévention de l’anxiété chez les chiens placés en refuge : étude bibliographique pour l’élaboration de directives destinées aux refuges.
Bray et al. (2017) – Effects of maternal investment, temperament, and cognition on guide dog success.
Lozano et al. (2021) – Exposure of pregnant rats to stress and/or sertraline: Side effects on maternal health and neurobehavioral development of male offspring.
Influence de la génétique et de la biologie sur le stress et l’anxiété
Ces études examinent le rôle de la génétique et des processus biologiques dans le développement de l’anxiété et du comportement réactif chez les chiens :
Ley, Bennett & Coleman (2008) – Personality dimensions that emerge in companion canines.
Marinelli et al. (2007) – Quality of life of the pet dog: Influence of owner and dog’s characteristics.
Sarviaho et al. (2019) – Two novel genomic regions associated with fearfulness in dogs overlap human neuropsychiatric loci.
Sarviaho et al. (2020) – A novel genomic region on chromosome 11 associated with fearfulness in dogs.
Est-ce que vous appelez « éthique » tout ce qui correspond à vos valeurs personnelles et aux attentes sociales ? Ou avez-vous vraiment pris le temps de remettre en question l’aspect éthique de vos méthodes ?
Peut-être que vous vous dites que votre vertu dépasse celle des autres ? Que vos décisions en matière d’éducation canine sont, par essence, plus justes, plus éthiques, plus respectueuses des chiens ?
Mais… attendez un peu !
Il est possible que l’effet de supériorité illusoire ait discrètement infiltré vos pensées. Ce biais cognitif, sournois et insidieux, pourrait bien avoir biaisé votre jugement. Il vous pousse à croire que vos actions sont moralement supérieures, creusant un fossé entre vous et ceux qui osent voir les choses différemment.
Mais… pause !
Que savez-vous vraiment des concepts d’éthique et de morale appliqués au comportement animal ? Avez-vous pris le temps de creuser ces notions complexes ? Ou êtes-vous simplement persuadé que vos intuitions suffisent à définir ce qui est bon et juste ?
Ce que nous verrons ensemble dans cet article :
L’effet de supériorité illusoire et son impact direct sur la manière dont nous percevons les méthodes des autres professionnels du domaine animal
Les distinctions clés entre morale et éthique – et pourquoi cela compte vraiment
L’impact dévastateur d’un manque de connaissances éthiques sur la pratique canine. Et ce, peu importe la ‘’méthode de dressage canin’’ que vous utilisez ou l’étiquette que vous endossez à titre d’éducateur canin.
L’effet de supériorité illusoire
L’effet de supériorité illusoire et la tendance à croire que sa propre vertu est supérieure à celle des autres sont étroitement liés par un phénomène psychologique commun : l’exagération de l’auto-perception positive.
Dans l’effet de supériorité illusoire, les individus surestiment leurs compétences, qualités ou traits par rapport aux autres. Ils se croient généralement plus compétents ou intelligents. Ce biais peut également s’appliquer aux valeurs morales et aux comportements vertueux. Lorsqu’une personne pense que sa propre vertu est meilleure que celle des autres, elle entre dans une forme de biais moral, une extension de l’effet de supériorité illusoire.
Le lien entre ces deux phénomènes repose sur l’idée que l’individu évalue ses actions, ses valeurs et ses croyances comme étant moralement supérieures. Et en même temps il sous-estime ou dévalorise celles des autres. Cela peut créer une perception erronée de sa propre éthique et encourager un sentiment de jugement moral. L’individu critique les autres pour leurs comportements jugés moins vertueux.
Et vous savez quoi ? Nous avons tous tendance à croire que nos valeurs et nos jugements moraux sont supérieurs à ceux des autres. Surtout lorsqu’ils ne partagent pas notre point de vue. Après tout, ce serait surprenant de se positionner sur certains enjeux sans être convaincus de leur justesse, n’est-ce pas ?
En somme, l’effet de supériorité illusoire, appliqué à la moralité, conduit à un biais de supériorité morale. On se considère plus éthique ou vertueux que les autres, renforçant une vision faussée de sa propre excellence morale.
La différence entre la morale et l’éthique
La morale et l’éthique sont deux concepts souvent confondus, mais ils ont des distinctions importantes, surtout dans le domaine de l’éducation canine.
La morale se réfère à un ensemble de croyances personnelles ou culturelles sur ce qui est bien ou mal.
Elle est généralement influencée par la société, la religion ou les valeurs individuelles.
Par exemple, un éducateur canin peut juger que l’utilisation d’un collier à pointes, le fait de mettre un chien en cage, d’utiliser sa nourriture pour l’entraînement, de mettre le chien en retrait pour le punir ou encore d’administrer des antidépresseurs à un chien sont immoraux. En effet, il voit ces pratiques comme une forme de maltraitance envers l’animal, en accord avec ses convictions personnelles.
L’éthique, quant à elle, repose sur une réflexion plus large et rationnelle.
Elle est axée sur ce qui est considéré comme juste ou injuste, fondée sur des principes universels dépassant les croyances individuelles. Elle incite à examiner les répercussions de nos actions sur le bien-être des chiens et à évaluer chaque méthode de manière objective et globale.
Mais, l’éthique ne pointe pas du doigt une action (ou une méthode d’entraînement, si vous préférez). L’éthique nous pousse à prendre du recul pour constater ou prévoir les conséquences possibles d’une action.
Ainsi, une pratique éthique ne coïncide pas nécessairement avec une pratique morale. Une approche éthique se définit par une analyse rigoureuse de nos actions. Dès lors que vous vous interrogez, par exemple, sur les bénéfices et les risques d’une intervention, vous adoptez une démarche éthique, peu importe l’issue de votre réflexion.
Dans le cadre de la formation EPICC pour devenir éducateur canin dans laquelle j’ai l’honneur d’enseigner, j’explore en profondeur les distinctions fondamentales entre ces deux concepts. J’incite également les étudiant-e-s à remettre en question leurs idées préconçues et à adopter une réflexion critique qui dépasse les simples croyances personnelles. Pourquoi est-ce essentiel ?
Faire la distinction entre la morale et l’éthique est crucial pour un éducateur canin.
Si l’on ne se fie qu’à ses convictions morales, on risque de juger les autres méthodes de manière subjective. Sans tenir compte des différents enjeux qui ont pu pousser un professionnel à adopter une approche plutôt qu’une autre.
En adoptant une approche éthique, on peut analyser les pratiques avec un regard plus ouvert et informé. En prenant en compte les raisonnements logiques, la science du comportement canin, et les besoins spécifiques de chaque chien, par exemple. Cela permet d’ajuster ses interventions de manière plus juste et responsable, en dépassant les jugements personnels pour mieux servir l’animal, son humain ainsi que la société.
Je vous entends déjà protester !
Mais, n’est-ce pas là une réflexion dangereuse ?
N’est-ce pas une pente glissante, bien savonneuse, qui mène tout droit vers des pratiques telles que l’euthanasie, l’utilisation d’aversifs, ou encore des outils et méthodes d’entraînement contraignants pour le chien ?
Oui, c’est un chemin vers une analyse approfondie sur les conséquences de nos actions. Et si cela vous effraie, peut-être vaudrait-il mieux interrompre votre lecture dès maintenant. Ne vous aventurez surtout pas dans ce chemin que vous devez tracer de vos propres réflexions.
Quand le pilotage moral automatique ne fonctionne plus !
Les dilemmes moraux sont inconfortables parce qu’ils confrontent nos valeurs, nos croyances et nos principes à des choix où aucune option ne semble pleinement juste ou satisfaisante.
Ce sentiment d’inconfort provient du fait qu’un dilemme moral nous force à choisir entre deux (ou plusieurs) alternatives. Chacune ayant des implications éthiques conflictuelles. Chaque option comporte des avantages et des inconvénients. Et souvent, quelle que soit la décision prise, elle entraîne un certain niveau de sacrifice ou de compromis.
Chaque intervention pour modifier le comportement d’un chien implique de prendre en considération le bien-être animal… Mais aussi…
La liberté des autres humains et de la collectivité
Les ressources utilisées pour arriver à nos fins
Les effets délétères et bénéfiques à court et à long terme
Le respect des lois
Etc…
Il est donc pratiquement impossible de prendre une décision entièrement morale lorsque vient le temps d’entraîner un animal :
Peut-être que nos clients devront faire des sacrifices pendant quelques semaines ou mois d’entraînement
Il est fort probable que nous devrons brimer la liberté du chien, que ce soit en utilisant un moyen de gestion ou en contrôlant l’accès aux motivateurs
Du temps et de l’argent seront utilisés pour réhabiliter un chien. Ces ressources auraient-elles mieux été investies pour aider dix autres animaux dans le besoin ?
Pour un propriétaire , l’un des dilemmes moraux les plus courants concerne l’euthanasie de son chien. À quel moment décide-t-on que la souffrance d’un animal est telle qu’il serait éthiquement correct de mettre fin à ses jours ?
Certaines personnes estiment qu’il est moral de prolonger la vie tant qu’il existe un espoir de guérison. D’autres au contraire jugent que la dignité et le confort de l’animal priment sur le désir humain de ne pas « abandonner » son compagnon. Ce dilemme repose sur une balance délicate entre ce que la morale personnelle nous dicte et ce que l’éthique suggère : minimiser la souffrance de l’animal.
Pour ceux qui travaillent dans le contexte de refuges, des décisions éthiques complexes surgissent lorsqu’il s’agit de répartir des ressources limitées.
Doit-on consacrer du temps et de l’argent à un seul animal gravement malade au détriment de plusieurs autres, dont la réhabilitation pourrait être plus facile et rapide ? Ce genre de dilemme pousse à réfléchir à la justice et à la responsabilité collective.
Ici, l’éthique questionne l’optimisation des ressources pour le bien-être global des animaux, même si cela va à l’encontre de la morale personnelle qui privilégierait peut-être une approche plus compassionnelle envers un cas individuel.
Pour un éducateur canin, les dilemmes moraux et éthiques apparaissent souvent lors du choix des méthodes d’intervention.
Par exemple, faut-il privilégier des méthodes d’entraînement qui garantissent des résultats rapides, mais potentiellement stressantes pour le chien, ou plutôt des méthodes plus douces, mais parfois plus longues à produire des effets tangibles ? L’éducateur canin doit ici naviguer en eaux troubles : le bien-être immédiat de l’animal versus l’efficacité de l’intervention et les attentes des propriétaires.
De plus, la question de l’utilisation d’outils de dressage de chiens controversés (comme les colliers électriques ou les cages) pose un dilemme moral majeur : certains éducateurs les considèrent comme contraires à leurs principes moraux, tandis que d’autres les voient comme un mal nécessaire pour assurer la sécurité de l’animal et des humains.
Par exemple, certaines personnes ne se sentent pas en sécurité de promener leur chien de 45 kilos sans un licou Halti ou sans un collier à pointes. Vaut-il mieux éliminer les promenades du chien ou laisser au client l’opportunité de faire des choix éclairés pour permettre au chien d’avoir plus de liberté ou d’exercice physique ?
Ici, il ne s’agit pas d’avoir recours au sophisme du faux dilemme. Il s’agit bel et bien des situations auxquelles les clients sont confrontés.
Autre exemple, concernant les chiens souffrant d’anxiété de séparation… Vaut-il mieux les médicamenter au plus tôt avec des médications psychotropes, comprenant des effets secondaires importants, mais permettant de diminuer rapidement les comportements dérangeants (destruction, aboiements, etc.) ?
Un autre exemple qui me vient en tête est la facilité avec laquelle nous suggérons le retrait, l’ignorance ou l’isolement d’un chien à titre d’éducateur canin en méthode positive, alors que pour les animaux sociaux, l’isolement social a des effets délétères au niveau émotionnel parfois plus élevés que l’utilisation de méthodes aversives.
Cela veut-il dire que nous ne devons plus utiliser l’isolement et lancer des briques sur la tête de nos chiens ? Non. Cela veut dire que nous devons pousser nos réflexions plus loin et choisir les méthodes d’intervention, qui, au final, apporteront le plus de bénéfices à l’individu et conseiller nos clients en conséquence.
Au final, les décisions éthiques ne sont pas les bonnes décisions; elles sont les moins pires.
L’impact dévastateur d’un manque de connaissances concernant l’éthique chez les éducateurs canins
Polarisation des discours autour des méthodes d’entraînement
Insultes et attaques personnelles, débats stériles, conflits idéologiques et conformité aux idées du groupe auquel nous appartenons ne sont que la pointe de l’iceberg des effets secondaires.
Ce manque de réflexion éthique limite la capacité à nuancer les propos et à prendre du recul sur les méthodes, menant à une absence de débat constructif; ce phénomène est particulièrement visible sur les réseaux sociaux, où les échanges se polarisent, réduisant la complexité du bien-être animal à des slogans, des faux dilemmes ou des positions extrêmes.
Le manque de débats constructifs empêche une réflexion profonde sur les meilleures pratiques pour le bien-être animal.
Malheureusement, les éducateurs canins ont tendance à se replier sur des règles morales personnelles, influencées par leurs croyances ou expériences individuelles. Alors qu’ils pourraient réfléchir objectivement aux conséquences de leurs actions sur le bien-être des chiens.
Enfin, la peur de sortir des sentiers battus pour réfléchir par soi-même est un autre frein majeur. Lorsque les éducateurs manquent de connaissances en éthique, ils se retrouvent souvent à suivre des approches « acceptées » par leur communauté ou par les courants dominants, de peur de se retrouver en dehors des consensus.
Cette conformité empêche une réflexion critique sur les pratiques existantes. Elle décourage toute tentative d’innovation ou de créativité dans l’entraînement canin. Les éducateurs hésitent à expérimenter ou à ajuster leurs méthodes par crainte d’être perçus comme éthiquement déviants, ce qui conduit à un immobilisme qui ne profite ni aux chiens ni à leurs propriétaires.
En somme, un manque de connaissances en éthique dans le domaine de l’éducation canine nourrit la polarisation des discours, inhibe les débats constructifs, entretient la confusion entre morale et éthique, et décourage les éducateurs de réfléchir par eux-mêmes. Il est donc essentiel de favoriser une meilleure compréhension des concepts éthiques afin de permettre des discussions plus riches, nuancées et ouvertes, tout en plaçant le bien-être animal au centre de ces réflexions.
Article rédigé par Simonne Raffa, Intervenante en comportement canin, propriétaire d’Évolution Canine
Attention ! Aujourd’hui nous abordons un sujet rébarbatif au premier abord, mais pourtant tellement important : les biais de la science appliqués à l’éducation canine !
Vous êtes un éducateur ou un intervenant en comportement canin (ou un propriétaire)sur la coche comme on dit ! Vous mettez un point d’honneur à suivre de nouvelles formations sur le comportement canin, vous vous tenez au courant des dernières avancées de la science, bref, vous êtes à jour ! Vous choisissez vos sources avec soins mais cela ne vous empêche pas d’être confus : parfois les experts se contredisent entre eux. Pire, ils se contredisent parfois eux-mêmes en affirmant une chose puis son contraire ! Bref, en éducation canine, comme en science (on l’a vu avec la pandémie de Covid19), il est parfois difficile de s’y retrouver.
Heureusement, en science comme en éducation canine, il « suffit » d’être bien outillé (entendez par là : avoir les connaissances nécessaires) pour tout démêler. Nous avons effleuré le sujet dans notre dernier article [La science au secours de l’éducation canine] 3 raisons de s’inspirer de la science en vous expliquant COMMENT notre domaine pourrait s’inspirer de la science pour s’améliorer et harmoniser ses discours et ses méthodes.
Dans ce deuxième volet de notre dossier , nous allons nous intéresser une cause majeure de ces incohérences : les biais. Et ils sont partout ! Des publications scientifiques que vous pouvez lire jusque dans votre propre pratique. Mais pas de panique, voici un petit guide qui vous permettra d’y voir un peu plus clair.
Ce que vous trouverez dans cet article :
Des solutions pratiques pour vous prémunir contre les biais qui pourraient nuire à votre travail
Des arguments sourcés
Deux vidéos pour approfondir le sujet
Un témoignage de cliente vous permettant de mieux comprendre l’impact des biais dans nos interventions.
Qu’est-ce qu’un biais et pourquoi s’en préoccuper ?
Un biais, c’est un peu comme si on portait des lunettes déformantes sans le savoir. Il peut nous faire tirer des conclusions erronées et rendre nos interventions moins efficaces [1]. En plus d’être responsables du manque de consensus dans notre domaine [2], ils peuvent également vous affecter plus directement en nuisant à votre travail.
Comment ? En déformant votre perception de la réalité et en vous conduisant à prendre de mauvaises décisions. Imaginez que vous identifiez mal un problème de comportement. Vous risquez de choisir une solution inadaptée et de mal évaluer vos progrès. À long terme, cela peut nuire à votre crédibilité et à votre confiance.
Témoignage de Sophie, propriétaire de Max, berger allemand de 4 ans : « Il avait un problème de protection de ressources : mon chien grognait et montrait les dents quand on s’approchait de sa gamelle. Un éducateur canin traditionnel nous a dit que Max essayait de dominer la famille. Il a recommandé des punitions et de reprendre la gamelle, mais cela a aggravé le comportement de Max, qui est devenu plus anxieux et agressif. Nous avons ensuite consulté un éducateur utilisant des méthodes basées sur la science. Il nous a appris à utiliser le contre-conditionnement en associant notre présence près de la gamelle à des friandises. En quelques semaines, Max a cessé de grogner et a même commencé à remuer la queue en nous voyant. Cette expérience m’a montré l’importance de choisir un professionnel dont les connaissances et les méthodes sont à jour. »
Les différents biais et leurs applications en éducation canine
Connaître ces biais, c’est un peu comme si on prenait conscience de la présence des lunettes déformantes sur notre nez. Ce n’est pas toujours facile de les retirer mais avec les bons apprentissages et un peu de pratique, on finit par y arriver.
Voici une vidéo en anglais (les sous-titres en français sont disponibles 😉 ) qui nous explique pourquoi, lors de la mise en place de tests, il est important d’être conscient des différents types de biais. Ici, les auteurs s’intéressent aux biais de mesure, de sélection et de confirmation.
Voici une présentation de nos principaux saboteurs :
Le biais de sélection : l’art de bien choisir ses sujets
Ce biais se glisse subtilement dans nos comparaisons lorsque les groupes que nous observons ont des différences fondamentales dès le départ. Imaginons que vous souhaitez comparer deux méthodes de dressage de chiens ou, plus probablement, que vous assistez à un débat sur le sujet sur les réseaux sociaux 😉 .
Voici plusieurs éléments auxquels vous devriez faire attention :
L’histoire canine compte : Imaginez deux chiens, l’un déjà familier avec une méthode d’entraînement, l’autre novice. Il est évident que le premier semblera plus performant ! C’est comme comparer un coureur expérimenté à un débutant [2]. Si vous souhaitez comparer les performances de deux entraîneurs aux méthodes différentes, assurez vous de prendre cet élément en compte.
La génétique en jeu : Chaque race a ses particularités. Un Border Collie sélectionné pour être réceptif à l’entraînement depuis des générations sera probablement plus facile à entraîner qu’un Shiba Inu indépendant et peu intéressé par la nourriture.
L’expertise du manieur : Si on compare deux méthodes, il faut s’assurer que les dresseurs les maîtrisent également. Sinon, c’est comme juger un match de tennis où un joueur aurait une raquette et l’autre une poêle à frire ! [4]
Ces connaissances peuvent nous aider à mieux juger de la qualité d’une publication scientifique ou, au quotidien, de déconstruire certains mythes tenaces.
Prenons un exemple classique :
Votre oncle est attaché à ses méthodes d’éducation traditionnelle. Il vante son chien de berger aurappel parfait et utilise comme contre-exemple le jeune beagle du voisin qui ne revient jamais malgré les friandises et l’application des conseils reçus sur un groupe Facebook. On pourrait lui expliquer gentiment que :
Les bergers sont génétiquement prédisposés à rester près de leur humain, contrairement aux beagles qui suivent leur nez [5].
Un chien de 8 ans est généralement plus calme qu’un jeune chien en pleine adolescence.
Une éducation structurée donne de meilleurs résultats que des conseils glanés sur les réseaux sociaux.
Dans le cadre d’une étude scientifique portant sur des chiens, on s’assurera que les groupes sont homogènes en terme de races et d’âge. En ce qui concerne les entraîneurs/manieurs, il est important que les auteurs mentionnent leur niveau d’expérience et de compétence avec telle ou telle méthode, technique ou exercice, ainsi que la manière dont ils ont évalué ce point : via un questionnaire ? une évaluation pratique ? en les recrutant dans un centre spécialisé ?
En gardant à l’esprit ces différences, nous évitons de comparer des pommes et des oranges. Cela nous permet d’avoir des discussions plus nuancées et constructives sur l’éducation canine.
Alors, la prochaine fois que vous entendez une comparaison douteuse, n’hésitez pas à partager ces connaissances ! Ensemble, élevons le niveau du débat sur l’éducation canine !
Le biais de performance : quand nos attentes influencent nos résultats
Imaginez que vous êtes un(e) enseignant(e) et que vous devez évaluer le travail d’élèves que vous connaissez. Il est fort probable que vous soyez plus indulgent avec votre élève préféré et plus intransigeant avec celui qui vous casse les pieds à longueur de cours. C’est un peu ce qui se passe avec le biais de performance dans l’éducation canine ! Ce phénomène se produit lorsque nos attentes ou nos actions involontaires influencent les résultats de nos observations ou de nos méthodes d’entraînement[6].
Dans le monde de la recherche canine
Ce biais peut se manifester de manière surprenante. Par exemple, un chercheur pourrait inconsciemment passer plus de temps avec les chiens utilisant sa méthode préférée, leur donnant ainsi un avantage injuste [7]. Mais ce biais ne concerne pas que les chercheurs en blouse blanche. En tant qu’éducateurs canins ou propriétaires de chiens, nous sommes tous susceptibles de tomber dans ce piège :
Dans notre quotidien d’éducateur canin
Un client pourrait interpréter les grognements de son chien comme de l’agressivité chez un Rottweiler, mais comme un simple jeu chez un Labrador. On pourrait ainsi avoir plus de consultations liées à l’agressivité pour des molosses que pour d’autres races, mais serait-il légitime d’en conclure que les molosses sont plus agressifs que les autres ? Pas si sûr…
Cela pourrait également affecter vos plans d’intervention. Imaginez un instant que vous recevez en consultation un husky qui a du mal à revenir quand on l’appelle. Seriez-vous tenté de sortir directement la longe, pensant que c’est « typique de la race » ? Ou au contraire, si c’était un Border Collie, partiriez-vous du principe que le rappel sera un jeu d’enfant ? Ces réflexes, bien que basés sur une certaine logique, peuvent nous jouer des tours. Après tout, ce husky pourrait être particulièrement attaché à son maître et apprendre le rappel en un rien de temps. Et ce Border Collie pourrait avoir une personnalité indépendante qui rendra le rappel plus difficile.
Pour cela, n’hésitez pas à utiliser l‘analyse du comportement appliquée dont nous vous avons parlé dans notre dernier article sur les 3 raisons de s’inspirer de la science en éducation canine ! Utilisez des formulaires d’évaluation identiques pour chaque consultation, cela vous aidera à rester objectif et à ne pas sauter aux conclusions.
En fin de compte, chaque chien est unique, tout comme chaque relation chien-humain. En gardant cela à l’esprit et en restant vigilants face à nos propres biais, nous pouvons offrir le meilleur service possible à tous nos clients à quatre pattes… et à deux pattes !
Le biais de détection : quand on cherche, on trouve !
Imaginez que vous avez la même auto que votre voisin. Même marque, même modèle, même année. Sauf que vous avez effectuez trois fois plus de réparations que lui ! Seriez-vous tombé sur un citron ? Peut-être bien. Ou peut-être que c’est lié au fait que vous faites vérifier votre auto au complet par votre mécanicien à chaque changement de pneu/d’huile, ce qui lui permet de repérer les problèmes qui ne se voient ou ne s’entendent pas autrement. Chose que votre voisin ne fait pas. Eh bien c’est ça le biais de détection ! Il se produit lorsqu‘un groupe est surveillé de manière plus rigoureuse ou avec des outils différents que d’autres groupes, ce qui conduit à des résultats biaisés.
En tant qu’intervenants en comportement canin, nous devons être conscients que nos clients agissent comme des filtres. Et pour chaque chien on a un propriétaire différent, donc un « outil de mesure » différent. Ils nous rapportent ce qu’ils sont capables de percevoir.
Il n’est pas rare qu’un propriétaire nous dise que son chien a mordu « sans prévenir ». Mais en creusant un peu, on découvre souvent que le chien avait bel et bien envoyé des signaux d’inconfort ou de stress. Ces signes étaient simplement trop subtils pour être perçus par le propriétaire, ou bien celui-ci n’avait pas les connaissances lui permettant de les comprendre [8].
Alors, comment contourner ce biais ? Comme pour le biais précédent, l’utilisation de l’analyse du comportement appliquée et de formulaires d’évaluation standardisés sont une bonne solution. Ces outils nous aident à aller au-delà du « filtre humain » et à obtenir une image plus objective de la situation.
Et n’oublions pas que nous-mêmes ne sommes pas à l’abri de ce biais ! En tant que professionnels, il est crucial de rester vigilants et de remettre constamment en question nos propres perceptions.
Le biais d’attrition : quand les abandons nous jouent des tours !
Dans une étude scientifique, le biais d’attrition intervient lorsqu’on oublie de prendre en compte les sujets qui quittent l’étude en cours de route et que cela en modifie les résultats.
Dans notre quotidien, c’est un peu la même chose ! Les clients insatisfaits ont tendance à abandonner silencieusement. Une étude a révélé que les propriétaires de chiens aux problèmes persistants sont plus susceptibles d’arrêter les programmes de formation [9]. N’oubliez pas de suivre tous vos clients, même ceux qui partent et attention aux conclusions hâtives basées uniquement sur vos « succès » !
En conclusion, pour devenir un meilleur éducateur canin, intéressez-vous aussi à vos clients mécontents : ils vous aideront à mettre le doigt sur ce que vous pouvez améliorer 🙂
Le biais de déclaration : oups, j’ai oublié !
Je ne sais pas comment ça se passe pour vous, mais moi, j’oublie (trop) souvent des trucs. Heureusement, je me console en écrivant cet article car il me permet de réaliser que je ne suis pas la seule ! Les études, les professionnels du monde canin ou les clients peuvent aussi commettre des oublis ! C’est le biais de déclaration. Dans une publication, il se produit lorsque les participants rapportent de manière inexacte ou incomplète les effets d’un médicament par exemple.
Dans notre vie de propriétaire de chien ou de professionnel, ce serait plutôt lorsqu’on omet, consciemment ou pas, de rapporter des comportements ou des résultats d’entraînement.
Voici quelques exemples concrets :
Omettre certains détails : vous pourriez ne pas mentionner certains comportements de votre chien lors d’une consultation avec un professionnel car vous n’êtes pas conscient que cela a un lien avec votre problématique. Un propriétaire consulte un comportementaliste pour des destructions causées par son chien en son absence, mais il omet de mentionner que son chien le suit constamment dans la maison, pensant que cela n’est pas lié. Ce comportement d’hyper-attachement pourrait pourtant être un signe que son chien souffre d’anxiété de séparation. Cela pourrait ainsi fausser le diagnostic et le traitement proposé.
Minimisation des comportements agressifs : Un client pourrait sous-déclarer les comportements agressifs de son chien par crainte de se voir retirer son animal.
Mensonges par peur du jugement : Par peur d’être jugé, un client pourrait surestimer le temps de promenade ou minimiser les comportements problématiques de son chien. Il se pourrait aussi qu’un client nous affirme que tout va bien (son chien réussit tous les exercices et cela l’aide beaucoup avec sa problématique !) alors qu’il aurait besoin de meilleures explications ou d’un plan d’intervention plus adapté.
Non-respect des exercices : Ce client pourrait au contraire prétendre avoir suivi les exercices recommandés alors que ce n’est pas le cas, nous faisant croire que nos solutions sont inefficaces alors qu’elles n’ont simplement pas été mises en œuvre correctement.
Pour éviter ce biais de déclaration, il est essentiel de créer un climat de confiance et de bienveillance lors des consultations. Faire preuve d’empathie, rassurer le client sur l’absence de jugement, et encourager une communication ouverte peuvent permettre de recueillir des informations plus complètes et précises, et ainsi améliorer la qualité du diagnostic et des recommandations
Le biais de l’expérimentateur : quand nos attentes jouent les chefs d’orchestre !
Le biais de l’expérimentateur est comme diriger une pièce de théâtre mais sans s’en rendre compte ! Les attentes et gestes subtils du chercheur peuvent influencer inconsciemment les résultats de l’étude sur le comportement canin. Prenons l’exemple d’un scientifique convaincu de l’efficacité d’une méthode d’entraînement. Il pourrait involontairement donner des indices aux chiens, faussant ainsi leur performance. Un débat passionnant entre deux grands noms de la recherche canine illustre parfaitement ce biais. D’un côté, nous avons Ádám Miklósi, le champion de l’imitation canine. Il soutient, preuves empiriques à l’appui, que nos chiens sont capables de copier nos comportements. De l’autre, Clive Wynne joue l’avocat du diable. Il remet en question ces conclusions. Il suggère plutôt que ces comportements « imitatifs » pourraient en réalité être le fruit de renforcements involontaires, comme si on récompensait un chien pour avoir accidentellement fait le bon geste [10,11].
Mais ne croyez pas que ce biais ne concerne que les chercheurs en blouse blanche ! En tant qu’éducateurs canins, nous sommes tout aussi susceptibles d’être influencés par nos attentes. Peut-être avez-vous déjà remarqué que certains chiens semblent mieux répondre à vos exercices préférés ? Il se pourrait que vous leur donniez inconsciemment plus d’encouragements ou d’attention.
Alors, comment pouvons-nous surmonter ce biais ? La clé est la conscience et l’objectivité. En reconnaissant que nous pouvons être influencés par nos attentes, nous pouvons prendre des mesures pour minimiser cet effet.
Le biais de confirmation : quand nos croyances nous mènent en laisse
Vous pensez que votre chien est un fin gourmet qui n’obéit que pour une friandise ? Attention, il se pourrait bien que ce soit vous qui soyez ‘nourri’ par vos propres croyances ! On a tous ce petit biais qui nous pousse à voir ce qu’on veut bien voir… surtout quand une croquette est en jeu !
Le biais de confirmation se produit lorsque les chercheurs ou les entraîneurs cherchent, interprètent ou favorisent les informations qui confirment leurs croyances ou hypothèses préexistantes. Prenons l’exemple d’un propriétaire qui croit que son chien n’obéit que lorsqu’il a de la nourriture. Il pourrait inconsciemment renforcer cette croyance de plusieurs façons :
Attention sélective : Le propriétaire pourrait se souvenir principalement des moments où le chien obéit avec de la nourriture, tout en oubliant les occasions où le chien obéit sans récompense alimentaire.
Interprétation biaisée : Lorsque le chien obéit sans nourriture, on pourrait attribuer ce comportement à d’autres facteurs, comme l’absence de distractions.
Test biaisé : Le propriétaire pourrait donner des ordres de manière moins convaincante lorsqu’il n’a pas de nourriture, influençant ainsi le comportement du chien.
Négligence des contre-exemples : Le propriétaire pourrait ignorer les situations où le chien obéit sans récompense alimentaire, les considérant comme des exceptions.
Renforcement involontaire : En croyant que la nourriture est nécessaire, le propriétaire pourrait toujours avoir de la nourriture lors des séances d’entraînement. Il créerait ainsi une dépendance réelle à la récompense alimentaire.
Pour dépasser ce biais, pourquoi ne pas tester vous-même votre croyance ? Observez simplement comment réagit votre chien dans différentes situations, avec ou sans nourriture, et prenez le temps de noter les résultats. Vous pourriez être surpris !
Cumulation des biais
Préparez-vous, car les biais, c’est un peu comme des amis indésirables à une fête : ils adorent se regrouper et compliquer la situation ! Et quand ils s’allient, ils peuvent sérieusement fausser nos jugements. Voyons ensemble comment ces biais peuvent s’accumuler et créer un véritable effet boule de neige.
Biais de sélection et biais de confirmation : Un chercheur ayant une hypothèse préconçue pourrait sélectionner des chiens plus susceptibles de répondre positivement à une méthode, surestimant ainsi son efficacité.
Biais de performance et biais de détection : Un expérimentateur convaincu de l’efficacité d’une méthode pourrait être plus attentif aux comportements confirmant cette efficacité.
Biais d’attrition et biais de déclaration : Les propriétaires de chiens ne répondant pas bien à une méthode pourraient abandonner l’étude, tandis que ceux qui restent pourraient rapporter des résultats positifs, surestimant ainsi l’efficacité de la méthode.
Biais de l’expérimentateur et biais de confirmation : Les attentes de l’expérimentateur peuvent influencer son interprétation des résultats, accordant plus d’importance aux données confirmant ses hypothèses.
Pour illustrer cette cumulation, prenons un exemple hypothétique :
Un chercheur étudie l’efficacité d’une nouvelle méthode d’entraînement pour réduire l’agressivité chez les Pitbulls. Convaincu de l’efficacité de sa méthode (biais de confirmation), il sélectionne inconsciemment des Pitbulls qui semblent plus dociles au départ (biais de sélection). Pendant l’étude, il interprète plus facilement les comportements ambigus comme non agressifs chez les chiens soumis à sa méthode (biais de détection). Les propriétaires de chiens qui ne montrent pas d’amélioration abandonnent l’étude (biais d’attrition), tandis que ceux qui restent ont tendance à surestimer les progrès de leur chien dans leurs rapports (biais de déclaration). Enfin, lors de l’analyse des résultats, le chercheur accorde plus d’importance aux données confirmant l’efficacité de sa méthode (biais de confirmation).
La cumulation de ces biais pourrait conduire à la conclusion erronée que la méthode est hautement efficace pour réduire l’agressivité chez les Pitbulls, alors que cette conclusion ne serait pas représentative de la réalité.
Comment se prémunir contre les biais ?
Les biais, c’est un peu comme ces petits cailloux dans vos chaussures : difficiles à éviter, mais une fois qu’on les repère, on peut enfin marcher plus sereinement ! Alors, comment s’en protéger et améliorer nos pratiques ? Voici quelques astuces pour garder nos jugements clairs et objectifs.
Connaître et reconnaître les biais : Soyez conscient de l’existence de ces biais et identifiez-les dans votre pratique quotidienne.
Adopter de bonnes méthodes de travail : Utilisez l’analyse fonctionnelle du comportement. Élaborez des plans d’entraînement structurés et adaptables, et basez-vous sur des données objectives et mesurables.
Pratiquer la réflexivité : Remettez régulièrement en question vos méthodes et conclusions.
Collaborer et échanger : Partagez vos expériences avec d’autres professionnels pour identifier vos biais et améliorer vos pratiques.
Se former continuellement : Restez à jour sur les dernières recherches en comportement canin et en méthodes d’entraînement.
Utiliser des outils standardisés : Adoptez des grilles d’évaluation et des protocoles standardisés pour réduire la subjectivité.
Nos biais révélés : pour une approche plus juste avec nos chiens !
Imaginez-vous en train de nettoyer une paire de lunettes embuées. À chaque coup de chiffon, votre vision s’éclaircit un peu plus.
C’est exactement ce que nous faisons lorsque nous prenons conscience de nos biais et que nous travaillons à les surmonter !
Tout au long de notre exploration, nous avons découvert une multitude de biais qui peuvent influencer notre travail avec les chiens. Ces biais sont comme des filtres subtils qui colorent notre perception, parfois sans même que nous nous en rendions compte.
Mais ne vous inquiétez pas, nous avons un allié de taille : la méthode scientifique !
En adoptant une approche scientifique, nous pouvons progressivement retirer ces filtres et voir la réalité avec plus de clarté. C’est un peu comme si nous devenions des détectives du monde canin. Nous cherchons des preuves objectives plutôt que de nous fier à nos intuitions parfois trompeuses.
N’oublions pas que nous sommes un peu comme des chercheurs sur le terrain. Chaque jour, nous observons. Nous testons des hypothèses, et nous ajustons nos méthodes en fonction des résultats. Cette approche scientifique nous permet non seulement d’être plus efficaces, mais aussi plus éthiques dans notre travail.
Car au final, quel est notre objectif ultime ? Le bien-être de nos chiens !
Alors, la prochaine fois que vous travaillez avec un chien, rappelez-vous : chaque biais surmonté est un pas de plus vers une relation plus harmonieuse :). N’est-ce pas là la plus belle récompense que nous puissions espérer ?
[1] Rosenthal, R., & Rosnow, R. L. (2008). Essentials of Behavioral Research: Methods and Data Analysis. McGraw-Hill. [2] Hiby, E. F., Rooney, N. J., & Bradshaw, J. W. (2004). Dog training methods: their use, effectiveness and interaction with behaviour and welfare. Animal Welfare, 13(1), 63-69. [3] Serpell, J. A., & Hsu, Y. (2005). Effects of breed, sex, and neuter status on trainability in dogs. Anthrozoös, 18(3), 196-207. [4] Blackwell, E. J., Twells, C., Seawright, A., & Casey, R. A. (2008). The relationship between training methods and the occurrence of behavior problems, as reported by owners, in a population of domestic dogs. Journal of Veterinary Behavior, 3(5), 207-217. [5] Turcsán, B., Kubinyi, E., & Miklósi, Á. (2011). Trainability and boldness traits differ between dog breed clusters based on conventional breed categories and genetic relatedness. Applied Animal Behaviour Science, 132(1-2), 61-70. [6] Rosenthal, R. (1994). Interpersonal expectancy effects: A 30-year perspective. Current Directions in Psychological Science, 3(6), 176-179. [7] Udell, M. A., & Wynne, C. D. (2008). A review of domestic dogs’ (Canis familiaris) human-like behaviors: or why behavior analysts should stop worrying and love their dogs. Journal of the experimental analysis of behavior, 89(2), 247-261. [8] Mariti, C., Gazzano, A., Moore, J. L., Baragli, P., Chelli, L., & Sighieri, C. (2012). Perception of dogs’ stress by their owners. Journal of Veterinary Behavior, 7(4), 213-219. [9] Blackwell, E. J., Casey, R. A., & Bradshaw, J. W. (2016). Efficacy of written behavioral advice for separation-related behavior problems in dogs newly adopted from a rehoming center. Journal of Veterinary Behavior, 12, 13-19. [10] Miklósi, Á. (2007). Dog behaviour, evolution, and cognition. Oxford University Press. [11] Wynne, C. D. L. (2004). Do animals think? Princeton University Press.
Chers éducateurs canins(et autres professionnels du domaine), avez-vous déjà ressenti la frustration de ne pas obtenir les résultats escomptés de vos interventions ? Ou bien, vous vous sentez démunis face au nombre d’informations disponibles sur les médias sociaux… Ce qui a pour effet de faire ressortir votre vieil ennemi : le syndrome de l’imposteur. Ne vous inquiétez pas, nous allons tenter aujourd’hui de vous fournir un nouvel outil à ajouter à votre arsenal : la science ! Car oui, la science peut devenir votre meilleure alliée pour surmonter les obstacles que vous rencontrez lors de vos plus grands moments de doutes. En explorant ensemble les connaissances scientifiques, nous allons vous aider à :
Affiner vos méthodes d’entraînement
Résoudre efficacement les problèmes de comportement de vos compagnons
Démêler le vrai du faux et les nuances apportées par la science
Satisfaire pleinement vos clients, qu’ils aient deux ou quatre pattes.
Embarquons donc ensemble dans cette aventure enrichissante et transformons vos pratiques pour améliorer le bien-être de nos chiens et de ceux de nos clients !
Ce que vous trouverez dans cet article :
Des découvertes scientifiques passionnantes
Des trucs concrets et efficaces pour améliorer vos interventions
Plusieurs vidéo vous présentant des concepts clé : L’attachement, l’analyse comportementale appliquée et les biais cognitifs
Des astuces pour concevoir de meilleurs plans d’entraînement
Raison #1 : Une source inépuisable de savoir
Les avancées en éthologie et en cognition canine nous permettent de mieux comprendre la façon dont nos chiens pensent, apprennent et interagissent. Ces découvertes sont donc LES clés pour développer des méthodes de dressage de chiens non seulement plus efficaces, mais aussi plus respectueuses du bien-être animal. Le but ? Diminuer les comportements dérangeants menant à de trop nombreux abandons de chiens, au Québec comme ailleurs.
En voici deux exemples :
1- Découvrez l’impact de vos émotions et expressions
Vous vous en doutiez mais la science l’a confirmé : les chiens sont capables de lire nos émotions ! En effet, ils savent distinguer la joie de la colère, même sur des visages inconnus [1] ou dans l’intonation de leur voix. Cette découverte souligne donc l’importance de notre langage corporel et de nos expressions faciales. Une publication récente a même suggère que les chiens répondent mieux à une commande (« assis ») lorsque la personne qui le leur demande est joyeuse [2].
Mais ce n’est pas tout ! Il a également été démontré que nos chiens peuvent être affectés par les émotions qu’ils perçoivent. Ainsi, un chien qui perçoit la joie de son propriétaire aura plus tendance à remuer la queue et se rapprocher de lui [3]. Alors qu’au contraire, les chiens exposés à des visages colériques montrent des signes d’inconfort, notamment en se léchant les babines [4]. Pensez-y donc si votre chien fugue ou si vous désirez lui apprendre le rappel !
Le message est clair : notre état d’esprit est la clé du succès de l’apprentissage de nos chiens.
Soyez heureux d’entraîner votre chien !
Voici quelques stratégies éprouvées :
Cultivez une attitude positive : Le sourire et le plaisir sont vos meilleurs alliés pendant l’entraînement ! Plongez-vous dans des disciplines qui vous passionnent tous deux(pensez au Rallye-O, à l‘agilité ou à la détection d’odeurs), inventez des exercices ludiques, et entourez-vous de coach en comportement canin et de collègues inspirants. Ces approches renforceront votre lien avec votre chien et transformeront l’obéissance en un jeu captivant. Votre bonheur authentique est la clé de votre réussite !
Bannissez le stress : Créez l’environnement idéal pour l’entraînement. Adaptez les défis à votre niveau et à celui de votre chien, et utilisez des techniques de gestion appropriées. Par exemple, pratiquez les promenades en laisse avec votre chien après avoir joué au tug avec votre chien ou quand l’excitation de partir en balade s’est enfin calmée. Un chien détendu est un chien réceptif ! Pour travailler avec votrechien réactif, commencez dans un cadre contrôlé, loin des déclencheurs. Ou, encore, pratiquez votre chien réactif par frustration à voir d’autres chiens après une séance de jeu avec ses copains canins. Vous favorisez ainsi votre réussite, vous conserverez votre motivation et vous y trouverez même du plaisir et de la fierté !
2- La science démontre l’importance de l’attachement dans l’éducation canine
La recherche nous permet également de comprendre comment d’autres facteurs cruciaux, comme l’âge, la race de nos chiens et l’environnement influencent leur apprentissage.
Ainsi, une autre découverte récente a permis de mettre en lumière un élément autrefois sous-estimé : la relation d’attachement entre le chien et son humain. Faites-vous partie de ces humains qui considèrent leur chien un peu comme leur enfant ? Eh bien sachez que votre chien, lui, vous considère lui-aussi comme son parent.
En effet, plusieurs études ont démontré que le lien qui nous relie est unique et ressemble fortement à celui qui unit un enfant et ses parents [5]. Et comme pour un enfant, un lien d’attachement sécurisant est un besoin pour votre chien, au même titre que boire et manger. La science a montré que si vous soignez votre relation, votre chien sera plus confiant, plus résilient et moins sujet aux problèmes de comportements. Cela pourrait même vous aider, par exemple, à passer plus facilement le cap de l’adolescence de votre chien, selon une étude parue en 2020 [6].
Pour renforcer votre relation, assurez-vous de respecter ces 3 règles :
Répondez à ses besoins physiques. Votre chien a besoin d’une nourriture de qualité, d’eau à volonté , de sommeil et d’activité physique régulière.
Répondez à son besoin de sécurité. Fournissez-lui un environnement rassurant et respectez ses signaux et répondez-y de manière appropriée. Par exemple, si votre chiot pleure dans sa cage lorsqu’il passe sa première nuit chez vous, n’hésitez pas à la rassurer et rester près de lui. Paradoxalement, savoir qu’il peut compter sur vous aujourd’hui facilitera son acquisition d’indépendance plus tard !
Adoptez une méthode d’éducation claire et bienveillante. Les méthodes d’éducation trop autoritaires ou inconsistantes sont plus souvent associés à des problèmes de comportement, chez les chiens comme chez les enfants.
En conclusion : un chiot épanoui et bien éduqué est avant tout un chiot dont les besoins profonds de proximité, de sécurité et d’affection ont été pleinement comblés.
Cette vidéo illustre comment l’attachement entre le chien et son humain renforce sa résilience et met en évidence la spécificité de ce lien par rapport aux chats.
Raison #2 : La science comme modèle méthodologique en éducation canine
La science ne se contente pas de nous apporter des connaissances, elle nous offre un cadre méthodologique puissant et indispensable. En adoptant une approche scientifique, nous sommes en mesure de remettre en question nos pratiques de manière constructive et de rechercher des preuves tangibles de l’efficacité de nos méthodes. Cette démarche rigoureuse est la clé pour devenir des professionnels de l’éducation canine plus compétents et plus efficaces.
L’analyse du comportement appliquée : Une approche scientifique pour des résultats concrets
Il arrive parfois que, malgré vos efforts, les problèmes de comportement de votre chien ne soient pas résolus après plusieurs consultations. Cela peut être dû à une mauvaise identification du problème initial, souvent causée par une méthodologie inappropriée. C’est ici que l’Analyse Comportementale Appliquée (ACA) entre en jeu, offrant une approche rigoureuse et scientifique pour mieux comprendre et aborder ces comportements.
Pour résoudre efficacement un problème de comportement, nous devons adopter la même rigueur qu’un scientifique. Prenons l’exemple d’un chien réactif envers ses congénères.
Notre rôle est d’émettre des hypothèses précises : le chien agit-il par peur, par frustration, ou cherche-t-il à protéger une ressource ? Pour tester ces hypothèses, nous devons poser les bonnes questions sur l’environnement du chien : le comportement se manifeste-t-il en laisse ou en liberté ? Avec tous les chiens ou seulement certains ? À quelle distance ? En posant ces questions ciblées, nous collectons des données cruciales qui nous permettent de comprendre ce qui motive et maintient le comportement du chien. À partir de ces éléments, nous pouvons mettre en place des stratégies d’intervention efficaces car adaptées au cas par cas.
L’ACA est donc une approche individualisée qui permet de concevoir des interventions sur mesure, adaptées aux besoins spécifiques de chaque situation, maximisant ainsi leur efficacité.
Elle repose sur des données objectives et sur plusieurs décennies de science du comportement. De plus, l’ACA vise non seulement l’acquisition de nouvelles compétences, mais aussi leur maintien et leur généralisation à différents contextes. En adoptant cette approche, vous pouvez améliorer vos méthodes et garantir des résultats mesurables et tangibles dans vos interventions.
Structurer ses entraînements : La clé de la progression
Parfois, nos interventions ne donnent pas les résultats escomptés parce que nos plans d’entraînement manquent de clarté. Un plan confus est difficile à suivre, tant pour le chien que pour votre client humain, ce qui peut entraver leur apprentissage à tous les deux. C’est pourquoi structurer vos plans est essentiel pour gagner en clarté et en efficacité. Cela rendra l’apprentissage plus simple et plus fluide.
Pour cela, vous pouvez vous inspirer de la méthodologie et de la rigueur scientifique. Elle vous permettra d’identifier et de formuler des objectifs et des critères clairs et détaillés.
Voici un exemple concret pour enseigner à un chien à s’asseoir :
Objectif : Apprendre au chien à s’asseoir sur commande
Action de l’humain : Leurrer le chien en plaçant une friandise devant son nez et en la déplaçant lentement vers le haut et l’arrière
Réaction attendue du chien : Suivre la friandise avec sa tête et poser ses fesses au sol
Critère de réussite : Le chien pose complètement ses fesses au sol
Progression : Passer à l’étape suivante après 5 réussites consécutives
Plan B : Si le chien ne réussit pas, récompenser les comportements intermédiaires pour le guider progressivement vers l’objectif.
Cette approche structurée peut sembler fastidieuse au premier abord, mais elle garantit une communication claire et efficace, tant pour le chien que pour son humain.
Évaluer l’efficacité de nos interventions : Des résultats mesurables pour un progrès tangible
Pour garantir l’efficacité de vos interventions, il est essentiel d’évaluer objectivement vos progrès. La science vous offre des outils précieux pour mesurer ces progrès de manière fiable. Prenons l’exemple d’un chien réactif en promenade.
Pour évaluer l’efficacité de votre travail, concentrez-vous sur des critères mesurables :
Fréquence : Observez si le chien passe d’une réaction systématique à une réaction une fois sur deux.
Intensité : Notez si la réaction passe d’une traction forte à une simple tension sur la laisse.
Durée : Vérifiez si un aboiement prolongé se réduit à une réaction d’une seconde.
Distance : Évaluez si le chien passe d’une réaction à vue à la capacité de croiser d’autres chiens sans incident.
Ces mesures concrètes vous permettent de quantifier les progrès réalisés et d’ajuster vos méthodes en conséquence. En adoptant cette approche, vous assurez une amélioration continue et tangible dans vos interventions.
Raison #3 : Tirer parti des défis scientifiques pour surmonter nos propres obstacles
Vous êtes-vous déjà demandé comment aider vos clients qui, après avoir consulté plusieurs professionnels aux avis divergents, se sentent perdus et confus face à la multitude d’approches en éducation canine ?
Un milieu aux courants de pensées très hétérogène et polarisé
C’est un défi courant, et il est tout à fait compréhensible que les propriétaires de chiens se sentent désemparés. Avec tant de courants différents, il est facile de se perdre dans :
Les méthodes traditionnelles versus les approches basées sur la réponse aux besoin des chiens
Les techniques basées sur la dominance comparées à celles qui privilégient l’utilisation du modèle béhavioriste
Les conseils donnés sans contexte sur les médias sociaux versus les approches globales
Toutes les méthodes ne se valent pas
Alors, comment pouvez-vous naviguer dans cette complexité et guider vos clients de manière efficace ? Voici quelques pistes inspirées de la démarche scientifique qui pourraient vous aider :
Analysez les méthodes :
Prenez le temps d’évaluer les différentes approches et leurs fondements. Cela vous permettra de mieux comprendre ce qui fonctionne et pourquoi. Ainsi, de nombreuses publications ses sont intéressés au sujet au cours des dernières années. Malgré des résultats parfois discordants, un consensus commence à émerger.
Ainsi, les chiens entraînés en renforcement positifs seraient plus obéissants et moins sujets aux problèmes de comportement que les chiens éduqués avec des méthodes punitives [7]. Ainsi, des organisations comme le Collège Américain des Vétérinaires Comportementalistes d’Amérique (ACVB) [8] ou l’Ordre des Médecins Vétérinaires du Québec (OMVQ) [9] ont pris position sur le sujet et décidé de déconseiller l’utilisation des aversifs.
Soyez critique :
La science est en constante évolution, et il est crucial de garder à l’esprit que l’hypothèse favorisée aujourd’hui pourrait être remise en question demain, comme nous l’avons vu avec la pandémie de Covid-19, la plattitude de la terre ou même la prescription d’hormones chez les femmes monoposées. C’est pourquoi l’esprit critique est essentiel : il nous permet de mieux percevoir les nuances, les biais et les limites des études scientifiques.
Pour vous aider à y voir plus clair, nous publierons prochainement un article détaillé sur les biais en science, qui vous aidera à les identifier et à mettre les résultats en perspective. Nous profiterons de cette occasion pour illustrer ces concepts en prenant comme exemples certains articles sur les méthodes d’entraînement canin, un domaine où les débats scientifiques sont particulièrement animés.
Testez et observez :
N’hésitez pas à expérimenter diverses techniques ou exercices. Observez les résultats et ajustez vos pratiques en fonction de ce qui fonctionne le mieux pour chaque couple chien-humain. Cette approche s’apelle l’empirisme et est l’une des bases de l’approche scientifique.
Restez flexible :
Adaptez vos méthodes en fonction des dernières découvertes scientifiques, du contexte de ces découvertes et des besoins spécifiques de chaque animal. La science évolue, et vous pouvez faire de même !
En adoptant une approche intégrative qui combine différentes disciplines comme l’éthologie, la psychologie et la biologie, vous pourrez offrir une vision plus complète de l’éducation canine. Pensez à :
Intégrer les aspects comportementaux et physiologiques dans votre compréhension du chien
Considérer le contexte social et environnemental de chaque animal
En faisant cela, vous serez en mesure de proposer des solutions personnalisées et adaptées à chaque situation. Non seulement vous améliorerez vos pratiques, mais vous aiderez également vos clients à démêler le vrai du faux dans le monde parfois déroutant de l’éducation canine.
[2] Bräuer J, Eichentopf D, Gebele N, Jandke L, Mann V, Schulte K, Bender Y. Dogs distinguish authentic human emotions without being empathic. Anim Cogn. 2024 Sep 21;27(1):60
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