Pour un chien heureux de plaire à ses maîtres!

Votre vétérinaire ou votre éducateur canin vous a suggéré de donner une médication à votre chien et vous vous demandez si cela est nécessaire ou ce que ça implique? Ou encore, vous connaissez des propriétaires de chiens qui ont fait ce choix et vous vous demandez « mais pourquoi donner du Prozac à un chien!? ».

L’utilisation de médicaments psychotropes chez le chien est encore une pratique mal comprise. Comme chez l’humain, il arrive que la thérapie comportementale ne soit pas suffisante et que, pour le bien du chien et de son entourage, la prescription soit nécessaire. Par contre, ce choix ne doit pas se faire à la légère : il est important de comprendre les enjeux de l’utilisation de ces médicaments ainsi que les impacts de refuser le traitement.

À quel moment la médication est-elle utile pour mon chien?

La ligne peut parfois sembler floue entre ce qui est un comportement « normal » et ce qui est « pathologique ». Il est normal pour tous les chiens d’avoir certaines craintes ou d’avoir des moments où ils deviennent surexcités et perdent le contrôle. Lorsque l’on croit que l’utilisation de médicaments psychotropes est utile, c’est parce que l’on constate une réelle détérioration de la qualité de vie de l’animal et/ou que l’animal peut représenter un danger pour lui-même ou son entourage.

Le chien n’arrive plus à s’autogérer et à s’adapter à son environnement. Cela a un impact sur les activités quotidiennes et sur la santé du chien.

Au niveau de la santé du chien, on peut constater :

• Une diminution ou une augmentation de l’appétit/perte ou prise de poids.
• Des troubles du sommeil : chien qui dort peu ou dort trop.
• Des troubles digestifs
• Des problèmes automutilation ou de chien qui se blesse en tentant de fuir une situation trop stressante (par exemple, il nous arrive de rencontrer des chiens qui se sont blessés en tentant de sortir de la maison lorsqu’ils sont laissés seuls chez eux)

Au niveau des activités quotidiennes, on peut constater :

• Perturbations des activités de jeu
• Perturbations des activité sociales
• Perturbation de l’apprentissage

Bref, le chien adopte un comportement inadapté à la situation et n’arrive plus à se gérer. Sa qualité de vie diminue ainsi que celle de ses propriétaires.

Souvent, on constate que le propriétaire fait de moins en moins d’activités avec son chien et que la relation entre les deux individus se détériore. Les événements de la vie quotidienne se transforment en vrai cauchemar : le propriétaire s’empêche de sortir de la maison car le chien ne peut être laissé seul en cas d’anxiété de séparation, il ne promène plus son chien car celui-ci aboie et grogne sur tout ce qu’il rencontre, il ne reçoit plus d’amis à la maison, car toutou passe son temps à attaquer les pieds des invités, quant au chien, il ne peut pas être toiletté ou soigné adéquatement car il est trop stressé ou il se mord les pattes jusqu’au sang chaque fois qu’il y a un orage, etc.

Régler des problèmes de comportement canin avec la médication?

La médication à elle-seule n’est pas très utile. Il est important de toujours la combiner à une thérapie comportementale suivie avec un intervenant en comportement canin.

La médication ne « guérit » pas le chien : elle diminue la fréquence et l’intensité des comportements problématiques. Elle réduit aussi le stress vécu par l’animal, et permet donc à la thérapie comportementale d’être plus efficace.

Lorsqu’un chien est dans un état de crise où il ne s’adapte plus, il est très difficile de le sortir de cet état et de lui apprendre à adopter un nouveau comportement ou de changer son émotion. C’est ce que la médication permet de faire, elle sort le chien de cet état de crise pour l’amener dans un état apte à l’apprentissage et l’adaptation.

Antidépresseurs ou anxiolytiques pour chiens

La balance des avantages et des inconvénients

Il est normal d’être hésitant lorsqu’un professionnel vous propose une thérapie médicamenteuse. Puisque ce choix doit être réfléchi, vous pouvez essayer de faire la liste des avantage et des inconvénients pour suivre ou non ce traitement. Ceux-ci peuvent être propres à chacun.
Dans les avantages, nommons une meilleure qualité de vie pour votre chien et vous, ainsi qu’augmenter l’efficacité et la rapidité de la thérapie comportementale.

Habituellement, il y a quatre craintes qui reviennent souvent :

1. Les possibles effets secondaires des anti-dépresseurs sur leur chien
2. Ne plus reconnaître son chien
3. Dépendre de la médication pour toujours
4. Le coût des médicaments

Et les effets secondaires?

Votre vétérinaire vous informera d’avance des effets secondaires qui sont possibles de rencontrer avec la molécule prescrite. La plupart du temps, ceux-ci sont minimes et disparaissent après quelques jours. Votre vétérinaire vous demandera de l’informer si vous constatez que ceux-ci persistent ou si vous observez un effet secondaire plus grave. À ce moment-là, il est possible qu’il décide de diminuer la dose du médicament pour l’instant pour l’augmenter plus tard ou alors il peut décider de changer de molécule.
Toutefois, sachez que les effets secondaires sont la plupart du temps très minimes et que les avantages de la médication les surpassent largement. Qui plus est, ils disparaissent normalement avec le temps. En tout temps, votre vétérinaire est là pour vous accompagner et pour s’assurer que tout se passe bien.

Des effets secondaires qui touchent aussi… l’environnement !

Il n’y a pas que nos chiens qui peuvent souffrir des effets secondaires des antidepresseurs. Les médicaments qui leurs sont administrés, y compris les psychotropes, ne sont pas entièrement métabolisés et leurs résidus peuvent se retrouver dans les eaux de surface et souterraines, où ils persistent longtemps. Ces composés peuvent agir comme perturbateurs endocriniens chez les poissons et les amphibiens, modifier leur comportement et s’accumuler dans la chaîne alimentaire

Exemple de cas rencontré (avec un nom fictif) dans lequel les avantages dépassent les effets secondaires :

Bella a 10 mois et vient d’être adoptée par Sophie. Sophie travaille de nuit et lorsqu’elle laisse Bella seule à la maison pour aller travailler, c’est la panique totale. Pendant les 8 heures durant lesquelles Sophie est absente, Bella hurle et détruit les meubles de la maison. Elle gratte aussi la porte d’entrée jusqu’à faire saigner ses griffes, ne boit pas et ne mange pas les gâteries laissées par Sophie. Sophie a essayé de mettre Bella en cage, mais elle prend les barreaux de la cage dans sa bouche et les secoue en essayant de sortir.

Sophie a peur pour la sécurité de Bella lorsqu’elle quitte et les voisins se plaignent des hurlements de sa chienne qui ont lieu la nuit.

Puisque la situation est urgente, Sophie ainsi que le comportementaliste qu’elle consulte afin de remédier à ces problèmes ont décidé de donner une médication à Bella qui agit pour quelques heures, le temps d’aller travailler. Comme effet secondaire, Sophie constate que Bella est un peu plus fatiguée que d’habitude. Par contre, maintenant Bella ne hurle plus, ne se blesse plus en tentant de s’enfuir et mange même les gâteries laissées par Sophie.

Pour récapituler, dans ce cas-ci, le nombre d’avantages par rapport à l’effet secondaire est beaucoup plus grand.

Avantages reliés à la médication :

1. Risque de blessures diminué
2. Le chien s’alimente
3. Le chien boit
4. Diminution des comportements de panique
5. Les voisins sont contents

Effet secondaire :

1. Endormissement

Est ce que je vais toujours devoir donner des médicaments à mon chien?

Dans la très grande majorité des cas, la réponse est non. La médication doit toujours être accompagnée d’une thérapie comportementale et elle sert a en augmenter l’efficacité.

Dans notre exemple, Sophie travaille avec un éducateur canin qui lui enseigne des exercices à faire afin d’apprendre graduellement à Bella à être en confiance quand son humain s’en va. Tranquillement, Bella sera capable de se retrouver seule de plus en plus longtemps et sera éventuellement capable de le faire sans médication.

Par contre, il faut comprendre que si les troubles mentaux existent chez les humains, ils existent aussi chez les chiens. Bien que nos connaissances soient beaucoup moins développées du côté canin, on sait qu’il existe des chiens qui auront toujours besoin d’un traitement médicamenteux. Toutefois, cela reste une minorité!

Si la perspective de donner un médicament psychotrope pour votre chien vous inquiète toujours, demandez-vous si vous auriez la même réaction si votre chien aurait un problème aux yeux ou au cœur qui nécessiterait de la médication? Probablement que non. Demandez-vous si le fait que ce soit invisible veut dire que cela ne nécessite pas une intervention médicamenteuse?

Est-ce que je vais toujours reconnaître mon chien?

La médication ne change pas le tempérament de votre chien. Elle est prescrite dans le but de diminuer le stress et d’améliorer la qualité de vie, en aucun cas elle n’altère la personnalité de votre chien.

Dans le cas de Sophie, le médicament provoque une certaine somnolence. Toutefois, dans la majorité des cas, le chien ne sera pas du tout somnolent en prenant de la médication.

Est-ce que ça coûte cher?

Il est difficile de vous donner un coût moyen (souvent entre 10 $ et 50 $ par mois), car cela dépend du médicament prescrit et de la dose. Le coût d’un médicament coûte évidement plus cher pour un chien de 120 livres que pour un petit chien de 10 livres.

Une solution économique est de demander à votre vétérinaire la prescription papier (certains vont vous en charger un petit montant) et d’aller la porter à votre pharmacie. La plupart de ces médicaments sont disponibles en pharmacie pour les humains et coûtent beaucoup moins cher que lorsque commandés chez le vétérinaire.

Vous pouvez aussi vous demander si vous faites des économies ailleurs en utilisant la médication. Dans le cas de Sophie, elle économise en frais vétérinaire chaque fois que Bella se blessait, en frais de gardiennage si elle avait choisit cette option, en frais de réparation de ce que Bella détruisait et de remplacement de meubles, en temps et en frais de thérapies comportementales puisque celles-ci seront plus efficaces et rapides avec la médication.

Et les produits naturels?

Il existe sur le marché beaucoup de produits naturels différents. Certains sont plus efficaces que d’autres et il peut être difficile de s’y retrouver. Vous pouvez essayer cette alternative avant d’en arriver à la prescription du vétérinaire. La plupart du temps, on va constater seulement une faible amélioration sur des cas « légers ».

Donner un psychotrope à son chien, est-ce une preuve de paresse?

Beaucoup de propriétaire hésitent à donner de la médication et ont l’impression que c’est la solution « facile » ou alors ce choix est perçu comme tel par l’entourage.

En fait, donner de la médication est un choix courageux : c’est accepter nos limites et celles de son animal pour mieux l’aider. C’est donner une chance à son chien d’aller mieux.

Il arrive souvent que je rencontre des propriétaires qui ont tout essayé avant d’en arriver à ce choix. Ils me disent combien ils ont pris la bonne décision et que, avoir su, ils n’auraient pas attendu aussi longtemps, que cela aurait éviter à leur animal de souffrir pendant des mois, voire des années.

 

Article rédigé par Clara Gosselin, comportementaliste canin

 

 

 

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Si vous travaillez comme éducateur canin et que vous vous rendez à domicile chez les propriétaires d’animaux qui ont besoin d’aide, vous savez déjà que le véritable défi n’est jamais tant de changer les comportements de l’animal, que de modifier ceux de son propriétaire! Pourtant, il y a de fortes chances que lors de vos études, vous n’avez reçu aucune formation particulière sur la relation avec cet étrange animal qu’est l’être humain. Et vous voilà un peu pris par surprise. Sachez que vous n’êtes pas seul dans cette situation!

En effet, lorsque je me suis renseignée auprès d’amis du milieu de l’entraînement à savoir ce qu’il manquait comme formation offerte, la réponse fut unanime : « je ne me sens pas outillée pour gérer l’humain qui est devant moi! ». En réponse à cette réalité et étant donné le fait que mon expertise est d’abord l’intervention auprès des humains, j’ai décidé de monter un séminaire sur la relation avec le client dans un contexte d’intervention auprès d’un animal.

L’humain : cet animal complexe

Ça semble simple et pourtant, c’est tout un défi! Parce que l’humain est l’animal le plus complexe qui soit. Parce qu’en plus d’être éducateur/trice canin, nous sommes aussi nous-mêmes des humains avec tout ce que cela implique : besoin de se sentir compétent devant l’autre, difficultés face aux valeurs et méthodes de dressage différentes des nôtres, vécues émotifs et impact des histoires de vies personnelles sur notre façon de voir la réalité, etc.

Cela dit, la réalité est que ce n’est pas à vous que reviendra le véritable travail à faire avec l’animal, mais bien à son propriétaire qui appliquera les méthodes que vous lui aurez enseignées. Il faut donc éduquer l’humain et travailler avec lui, d’abord et avant tout afin d’espérer observer des changements chez son animal.

1) L’importance d’établir une relation de confiance (avec le client)

Le milieu canin de l’éducation en renforcement positif mise beaucoup sur cette relation de confiance à établir auprès de l’animal, et on oublie parfois qu’elle est aussi essentielle pour susciter le changement chez le client. Sans celle-ci, vous risquez d’observer que le client ne met pas en pratique vos conseils lorsque vous quittez le domicile. Évidemment, puisqu’il n’a pas confiance en vous… pourquoi aurait-il confiance en vos méthodes?

La clé pour établir une relation de confiance est d’abord d’accueillir la détresse vécue par votre client. Si le client fait appel à un éducateur canin, c’est généralement qu’il rencontre un défi (ou plusieurs) avec son animal qu’il n’arrive pas à trouver des solutions par lui-même. Autrement, il serait fort probablement ravi d’éviter de dépenser pour vos services! Il est alors important d’être à l’écoute de ce sentiment vécu par le client.

Voici quelques stratégies supplémentaires pour établir une relation de confiance avec votre client :

• Soyez à l’écoute et empathique face au vécu du client
• Permettez aux clients de décrire sa réalité avec son vocabulaire (ce n’est pas le moment de lui dire que le concept de dominance chez le chien ne s’applique plus!, ni d’utiliser des termes tels que «Stimulus»!)
• Soyez honnête, intègre, sincère et nommez vos forces et vos limites professionnelles
• Mettez de l’avant les conditions idéales menant vers des succès
• Évitez de brandir la baguette magique!

2) Le danger de la baguette magique en intervention

Lorsqu’une personne vit une certaine détresse, comme le client d’un animal manifestant des comportements inadéquats, celle-ci espère que les choses changeront le plus rapidement possible.

Dans le monde de l’intervention et des thérapies humaines, c’est la même chose et on met en garde les futurs intervenants contre la fameuse baguette magique. Il faut absolument mettre de l’avant dès la première conversation avec le client le fait que vous n’avez pas de baguette magique. Vous ne serez pas en mesure de tout régler, par magie en quelques secondes et sans que votre client ne fasse un quelconque effort.

Au contraire, vous devez dès le départ mettre de l’avant le fait que le véritable acteur de changement sera ce client et que celui-ci devra appliquer les techniques éducatives et faire des efforts. Autrement, vous vous alignez tout droit vers un échec et beaucoup de reproches au moment auquel le client réalisera que les changements ne s’opèrent pas par magie chez son animal. Il cherchera un coupable et ce sera vous!

3) Susciter la motivation du client (et des autres membres du foyer)

En effet, tout comme vous aurez appris à susciter la motivation de l’animal (faire vivre des succès, défis adaptés aux capacités), il faudra en faire de même auprès du client pour espérer des changements suite à votre thérapie comportementale.

C’est d’autant plus difficile à faire si l’animal habite avec plusieurs humains! Si vous croyez que de susciter la motivation de madame n’est pas nécessaire étant donné que vous travaillez exclusivement avec son conjoint, vous réaliserez rapidement que l’animal ne progresse pas comme vous l’espériez.

À mon sens, il est donc nécessaire de susciter la motivation de tous les membres du foyer. Il faut donc impliquer le conjoint, les enfants, etc. Certains diront qu’il n’est pas possible de susciter la participation de tous les membres du foyer. Je leur répondrai que sans celle-ci, c’est pratiquement un échec garanti qui provoquera un sentiment de frustration en l’éducateur canin. Celui-ci verra alors le membre du foyer qui n’applique pas ses conseils comme un coupable de cet échec, alors qu’à mon sens, la faute lui revient au moins en partie. Soit parce que l’éducateur n’a pas identifié la participation de tous les membres comme une condition essentielle au succès de la démarche de réhabilitation ou alors qu’il n’a pas été capable de susciter la motivation de tout le monde.

4) Établir un plan d’intervention AVEC le client

Votre objectif ultime pour aider un animal est de transmettre des outils, connaissances et stratégies que son humain appliquera lorsque vous ne serez plus dans le foyer. Pour se faire, je suggère de cibler au maximum 3 comportements inadéquats étant prioritaires.

Ensuite, vous devez convenir avec votre client des stratégies à adopter afin de modifier ces comportements. Vous ne pouvez espérer vous contenter de simplement lui dire de faire ceci ou de faire cela, sans avoir validé avec lui que ses stratégies avaient un quelconque sens à ses yeux. Une stratégie intéressante est de réfléchir à voix haute avec le client sur le comportement problématique, sur ce qui maintient ce comportement en place et sur ce qui pourrait susciter du changement.

Si vous travaillez avec le client pour trouver des solutions, les chances que celui-ci les applique lors de vos absences sont beaucoup plus élevées.

Un séminaire sur la relation avec le client en intervention auprès d’un animal

Dans le cadre de mes études en psychologie et en psychoéducation, j’ai reçu plusieurs outils pour surmonter les défis rencontrés dans l’intervention auprès de l’humain. J’ai été appelé à faire beaucoup de travail sur moi-même et à me remettre en question par le biais d’analyses et de réflexions dirigées. De plus, j’ai compris l’importance d’apprendre à travailler avec des humains qui ne suscitaient pas naturellement une empathie en moi et pour lesquels j’éprouvais même parfois des sentiments contraires à mon rôle!

En discutant avec des amis du milieu de l’entraînement canin, j’ai entendu que les mêmes constats revenant souvent et suscitait de la frustration et j’ai décidé de mettre sur pied un premier séminaire pour permettre à ces amis du milieu de se sentir mieux outillé pour gérer cette bibitte étrange et contradictoire que nous sommes.

Article rédigé par Noémie Labbé-Roy, directrice de la fondation de chiens d’assistance Les Chiens Togo et psychoéducatrice. 

 

 

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